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JUSTICE ET DROITS DE L'HOMME A MADAGASCAR (2)
JUSTICE ET DROITS DE L'HOMME A MADAGASCAR (2)
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29 août 2010

SURVOL HEBDO 34/2010 - 23 au 29 août

Dernière minute : Marc Ravalomanana a été condamné le 28 août par contumace aux travaux forcés à perpétuité pour « meurtre et complicité de meurtre. Deux militaires - le général Heriniaina Roelina et le colonel Anatole Ramlamboarison - ont pour leur part été jugés coupables de complicité de meurtre. « Chacun d'entre eux est condamné à une peine de travaux forcés pour le restant de leurs jours. Un mandat d'arrêt a été délivré », a commenté la présidente du tribunal, Raboana Rasamison Mauricette.
Parmi les 19 accusés, 9 ont été condamnés à une peine de travaux forcés à perpétuité, 3 condamnés pour usurpation de fonction, les autres, en majorité membre de la sécurité présidentielle, ont été relâchés au bénéfice du doute. Ralitera Andrianandraina, ancien directeur de la sécurité de la HCC, écope d’une peine de 2 ans avec sursis, mais repart libre du palais de Justice. « Les voies de recours sont l'opposition et le pourvoi en cassation, on verra ce qu'on va faire », a annoncé l'avocate de la défense, qui a prévenu Marc Ravalomanana de sa condamnation. « Pour lui, ce n'est pas une décision sérieuse car la justice actuelle est trop instrumentalisée par le régime en place », a-t-elle indiquée, car « le but est de le condamner pour qu'il ne puisse pas rentrer à Madagascar et se présenter aux élections futures ». L’avocat Joseph Breham, qui représentait l’association des victimes de la tuerie (AV7), a estimé que les procès « respectait les canons d’un procès équitable, conforme aux standards internationaux ». Il a dénoncé une « politique de la chaise vide » adoptée par 14 accusés et certains défenseurs « pour pouvoir discréditer ensuite la décision ». « Mais pendant l’instruction et le procès, tous les avocats présents ont pu s’exprimer tout à fait normalement », a souligné Me Breham. « Une vérité assez claire est ressortie : il y a eu un massacre planifié, organisé, par l’ancien président et le directeur de sa sécurité, entre autres », a-t-il estimé. Cependant, insatisfait du verdict de la Cour Criminelle Ordinaire, l’association aurait décidé de faire appel, et de porter l’affaire devant le Tribunal Pénal International, annonce une dépêche.
L'ex-président exilé rejette sa condamnation. « Je rejette ce verdict parce qu’il est stupide, ridicule » a-t-il déclaré à l’AFP. Il estimé que cette condamnation devrait être déclaré nulle et non avenue ;  il a appelé la communauté internationale à condamner le régime actuel et à poursuivre l’application de sanctions ciblées à son encontre.
A noter que bon nombre d’observateurs ont estimé que l’ancien homme fort de Madagascar ne pouvait être jugé que par une Haute Cour de Justice, à l’instar des autres hauts dirigeants du pays qui pourraient être traduits en justice. Prévue dans les textes depuis près de trois décennies, cette haute juridiction n’a pas été mise en place par les différents chefs d’Etat qui se sont succédé à la tête de la Grande Ile. Aussi, lorsqu’il était encore au pouvoir, Marc Ravalomanana a-t-il déjà fait traduire en justice et condamné des ministres et d’autres hauts dirigeants malgaches par des juridictions ordinaires.
Une dépêche d’Orange.mg avait annoncé peu avant que les inculpés risquaient la peine de mort.

Développements à suivre dans la presse malgache du 30/08…


La crise politique

Six noms pour un Premier ministre. Les partis de l’Espace de Concertation, en accord avec la CNOSC, ont remis à Andry Rajoelina leur liste de candidats, comme le prévoit l’accord de sortie de crise du 13 août. L’actuel PM, Camille Vital, n’y figure pas. Des divergences de vues sont apparues après cette publication. Selon l’ancien Premier ministre de la HAT, Monja Roindefo, l’accord d’Ivato ne représente pas encore l’inclusivité nécessaire. Certains s’indignent de la précipitation avec laquelle une multitude de microstructures politiques, souvent méconnues, ont rallié, par opportunisme, cet accord politique. Le nombre des signataires ne cesse de grossir, on en dénombre 160. « C’est la curée aux postes » écrit un quotidien. Des critiques s’élèvent aussi au sujet de l’effectif, que certains jugent pléthorique, des nouvelles instances de la Transition prévues par l’accord du 13 août (400 personnes). Qui va financer des telles institutions ? La communauté internationale qui soutient l’accord ? Des « ressources » parallèles ?

La CNOSC prend l’initiative d’une rencontre politique inclusive à Vontovorona, en préambule à la « Conférence nationale » (reportée au 13 septembre, afin de mieux en assurer la préparation et tenter de rallier les 3 mouvances). Une démarche soutenue et financée officiellement par la communauté internationale. Ce report est critiqué par la HAT, qui exige que les discussions soient conduites sur la base des partis et non des mouvances. Il aura pour effet de remettre en cause le calendrier électoral adopté, notamment le référendum du 17 novembre. Une sourde rivalité apparaît entre les formations politiques et la société civile, cette dernière étant régulièrement accusée de partialité et d’opportunisme. Le manque de légitimité des uns et des autres est sans cesse mis en avant. La rencontre a démarré de manière hésitante et délicate pour les organisateurs et leurs invités, en l’absence des 3 mouvances, qui ont joué une valse-hésitation décriée par les participants. La CNOSC, notamment l’une de ses composantes, la CNOSC de Lalao Randriamampionona, a été suspectée par les « TGVistes » de vouloir réintroduire la médiation de la Sadc et de privilégier encore l’approche « mouvance ». Pour le chef de file de la mouvance Ratsiraka, la société civile n'est qu’un facilitateur, le médiateur principal demeure Joachim Chissano. Les 3 mouvances exigent en préalable la libération des prisonniers politiques et le retour au pays des anciens présidents en exil. Les partis politiques présents, parmi lesquels des éléments satellites des 3 mouvances, se sont livrés à une analyse comparative de la Charte de Maputo et de l’accord du 13 août, avec pour objectif d’aboutir à une synthèse à présenter à la « Conférence nationale ». La rencontre n’a pas pu aboutir à l’inclusivité recherchée. Elle devrait pourtant se poursuivre au CCI d’Ivato sous l’égide des « Raiamandreny mijoro », jugés par certains moins « partiaux » que le CNOSC, et en présence des représentants du GIC.

Le médiateur du GIC et émissaire de la Sadc, Joachim Chissano, reviendra début septembre dans la Grande Ile. Il est précédé par un envoyé spécial, Leonardo Simao, qui participe, avec ses collaborateurs, en observateur à la rencontre de Vontovorona. La Sadc affirme respecter la médiation de la CNOSC, suivant l’esprit malgacho-malgache, à condition que l’inclusivité et la consensualité soient respectées.

Fusillade du 7 février 2009 : début du procès. Les 19 présumés sont jugés par la Cour Criminelle Ordinaire (CCO). Marc Ravalomanana l’est par contumace, à titre de « complice ». 7 inculpés sont en détention préventive. Le procès avait été ajourné une 1ère fois. Au 1er jour, les avocats de la défense ont quitté la salle pour protester contre la décision de faire juger l’ancien chef de l’Etat par la CCO, alors que, selon eux, il devrait relever de la HCJ [prévue dans la Constitution mais jamais mise en place]. Ils ont déposé un pourvoi en cassation pour soulever ce vice de procédure et attendent la décision pour le 2 septembre. La Justice a refusé le report demandé et a commis d’office des avocats pour permettre la poursuite du procès. Pour Me Hanitra Razafimanantsoa, « les avocats des accusés sont régulièrement constitués, […] la commission d'office ne suit pas les règles de procédures et peut être considérée comme illégale ». Cette situation a créé une vive tension, au moment même où les partis tentent de jouer la carte de l’inclusivité. Des commentateurs s’étonnent que l’appareil judiciaire cède aussi facilement aux demandes des parties civiles pour un procès rapide, ce qui ne peut que donner des arguments à ceux qui refusent de croire à une sortie de crise raisonnée. L’association des victimes (AV7) condamne l’attitude de la défense.

Les Etats-Unis seraient disposés à participer financièrement à l’application des Accords de Maputo. « Un fonds de 80 millions de dollars pourrait être débloqué », selon la mouvance Ravalomanana.

Droits humains, gouvernance

Travail au Liban : les employées malgaches en vacances au pays ne pourront pas retourner chez leur employeur. La décision a été prise par le ministère de la Fonction publique, du Travail et des Lois sociales, qui renouvelle l’interdiction de toute délivrance d’autorisation de travail pour ce pays. La présidente du SPDTS explique que des membres du syndicat sont en mission sur l’axe Antananarivo-Toamasina pour sensibiliser les familles sur le trafic de personnes et les orienter dans leurs revendications. Près de 300 nouvelles doléances ont déjà été recueillies à cette occasion. Elle fait état d’un récent départ de jeunes filles de la région de Vatomandry sur un bateau à destination de Maurice. Le président du syndicat des agences de placement au Liban déclare que « seules » 9% des travailleuses au Liban sont victimes de maltraitance.

Magistrats : « Journée de solidarité contre la violence ». Par le biais de cette journée de grève, le Syndicat des Magistrats (SMM) veut attirer l’attention sur les situations préjudiciables au libre exercice de la fonction, notamment le manque d'indépendance de l’institution, l'interventionnisme de hautes personnalités, les menaces, les agressions et les violences qu’ils ont à subir. Le Conseil de l’Ordre des avocats annonce une mobilisation en solidarité avec Me Noro Rabemananjara, en détention préventive depuis le 5 août 2009, dans le cadre de l’affaire dite des « bombes artisanales ».

Actualité économique et sociale

La société Tiko Oil de Toamasina placée sous scellés, suite à une ordonnance du ministère de la Justice. La minoterie Mana, Tiko Oil Products et Tiko Oil Plants restent fermés malgré une décision de justice rendue à Antananarivo. Le tribunal avait décidé de la réouverture pour sauver l’outil de production, redonner un emploi aux personnels en chômage depuis janvier 2009, mettre fin aux pillages et sauver les denrées périssables entreposées.

Industrie extractive : les contrats demeurent secrets. Le récent contrat avec le chinois Wisco est l’occasion de rappeler que l’Etat n’a jamais publié ou n’a pas fait une large diffusion de ces documents qui sont pourtant du domaine public. Des lois ont été votées par les régimes successifs, qui offrent d’importants avantages fiscaux aux compagnies éligibles, mais seuls les initiés peuvent y avoir accès. Tant que la société civile et les communautés locales ne seront pas complètement informées des tenants et aboutissants des contrats et conventions conclus, la voie sera ouverte à la corruption et au détournement de deniers publics. Madagascar a choisi d’intégrer l’EITI mais il n’en est pas encore membre et les instances de l’Initiative lui ont donné une année supplémentaire pour produire ses rapports.

Trafics de bois de rose. Le ministre des Finances a effectué un contrôle inopiné au port de Toamasina suite à une suspicion d’exportation frauduleuse de conteneurs. Le Samifin a transmis au Bianco des dossiers de Déclarations d’Opérations Suspectes : il soupçonne des cas de corruption pour les 565 containers exportés suite à une autorisation exceptionnelle accordée par le régime en 2009. La plupart d’entre eux ont pu quitter le territoire sans que soient réglés amendes prévues. Une équipe de la direction du contrôle et de l’amélioration de l’intégrité du ministère de l’Environnement est à Mananara-Nord à la recherche des trafiquants.

Réforme foncière : second souffle pour le Programme National de réforme Foncière (PNF). Grâce à l’accord conclu entre les gouvernements malgache et français pour la remise de dette bilatérale vis-à-vis de la France, le PNF s’est vu doté d’une subvention d’1 million d’euros pour financer ses activités jusqu’à fin 2011. Il apportera un appui aux guichets fonciers communaux pour les aider à pérenniser leurs services.

Sécheresse dans le Sud : le charbon de bois détruit les forêts épineuses. Sa production est devenue un moyen de survie pour de nombreuses familles, déplore une ONG de défense de l'environnement, avec pour conséquence la destruction de forêts épineuses qui constituent un écosystème unique. Une activité non réglementée, qui fait rarement référence à une exploitation rationnelle et durable. Des opérateurs stimulent même la production en envisageant d’exporter vers La Réunion, Mayotte et les Comores. « La population de l’extrême Sud de Madagascar se trouve dans une situation proche du chaos. En dehors de la famine (kere) qui affecte une grande partie de la population et les troupeaux, les « dahalo » terrorisent les habitants. Faute de moyens adéquats, les forces de l’ordre ne peuvent que constater les dégâts, d’autres ont profité de la faiblesse des petits paysans pour leur soutirer de l’argent », écrit un quotidien.

Insécurité alimentaire : la Grande Ile se classe au 17ème rang des pays à hauts risques, d'après une étude de Maplecroft réalisée en collaboration avec le Pam et portant sur 163 pays.

Intégration régionale : une utopie selon la société civile des pays de la Sadc. Madagascar est pour l’heure suspendu de toutes ses instances mais depuis que le pays est entré en forcing dans ce groupement, il n’en a pas récolté de profits. Le marché est inondé de produits sud-africains et mauriciens. Situation aggravée par l’adhésion de Madagascar au Comesa qui favorise les produits mauriciens et égyptiens. Au sein de la Sadc et du Comesa, les pays à économies plus fortes profitent, en fait, des pays plus faibles qui ont peu à offrir. De quoi multiplier les déséquilibres commerciaux existants, estime la société civile.
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Les survols précédents sont archivés : >> Archives de presse depuis 2000  

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